Rogue One: A Star Wars Story (2016)
Rogue One : A Star Wars Story
de Gareth Edwards (2016)
Ce premier film spin-off ( “dérivé”) de la saga culte s’intéresse à une histoire différente de celle de la famille Skywalker au centre des épisodes classiques ; c’est aussi la seconde réalisation de Disney pour Star Wars après Le réveil de la Force de J.J Abrams (2015). Rogue One: A Star Wars Story suscitait les craintes et les attentes après un dernier opus efficace mais trop peu novateur , finalement le spin-off remplit parfaitement son contrat en surprenant grâce à une approche inattendue de cet univers pourtant si familier du public.
L’action se situe chronologiquement entre les épisodes III et IV, plus précisément quelques jours avant l’introduction d’Un Nouvel Espoir . Le film met la lumière sur la mission rebelle visant à subtiliser les plans de l’Etoile noire , nouvelle arme destructrice de l’Empire, pour en connaître les failles. Le postulat de base est aussi simple que cela peut de prime abord décevoir : l’univers de Star Wars est si vaste et porteur d’un tel potentiel que l’on aurait pu s’attendre à un film à l’intrigue plus ambitieuse , prenant place dans un autre contexte que celui de la Trilogie Originale. Certes , revoir les X-Wing et autres Stormtroopers qui ont bercé notre enfance jouent sur la fibre nostalgique mais l’impression de “déjà vu” était un réel danger pour ce film. Un spin-off se doit de proposer quelque chose de différent par rapport à sa saga d’origine pour justifier son existence; se concentrer sur une intrigue dont la majorité public connaît déjà l’issue était un risque important.
Et pourtant Rogue One: A Star Wars story parvient à surprendre en proposant un volet qui reste dans l’esprit Star Wars tout en apportant un nouveau souffle audacieux et bienvenu à la franchise. Ce qui frappe d’emblée est l’ambiance du long-métrage : exit la magie spirituelle de la force ou la mystique Jedi ; on a plutôt le droit à un véritable film de guerre qui pourrait être qualifié de “réaliste” dans sa démarche ( toutes proportions gardées ; parler de réalisme dans un space-opera peut paraître déplacé mais je précise bien que c’est dans la démarche que le film se rapproche d’un film de guerre très terre-à-terre). Nous découvrons une Rébellion qui mène une lutte désespérée et vaine pour déstabiliser un Empire tout-puissante. Et c’est cet combat perdu d’avance qui animera les héros qui n’en sont pas vraiment d’ailleurs. La noblesse chevaleresque des Jedis est bien éloignée des méthodes radicales du Capitaine Cassian Andor qui dirige l’escouade, ou des théories extrémistes de Saw Gerrera. Le film étoffe le background ( contexte) de cette sombre époque séparant la chute de la République et l’avènement de Luke Skywalker dont on connaissait bien peu de choses en détaillant la hiérarchie impériale ou les divers courants de la résistance plus ou moins extrémistes.
(Oh! Un X-Wing! Nostalgie quand tu nous tiens...)
La lumière ne semble pouvoir venir de nul part, les personnages sont livrés à eux-même et aucun héros salvateur ne volera à leur secours ; du moins pas du “bon côté” si tant est qu’il y ait encore un bon côté parfaitement défini vu comment le film malmène le manichéisme pourtant inhérent à la saga : ici les impériaux ne sont pas tous foncièrement mauvais ( Galen Erso) et tous les rebelles ne sont pas des anges.
Côté réalisation, le film est là aussi une réussite. Gareth Edwards nous avait déjà montré son amour du gigantisme et du jeu de perspectives lors de certains plans tétanisant de la bête dans son contrasté Godzilla (2014) , film aux bonnes idées de mise en scène qui perdait malheureusement son fil scénaristique. Dans Rogue One : A Star Wars story il continue à produire ce sentiment d’écrasement à coup de plongées et contre-plongées qui insistent sur le rapport de force ridiculement inégal entre le groupe rebelle et l’armada impériale. Les scènes d’actions sont filmés avec dynamisme et si on devine les CGI ( images de synthèses) ces dernières ne nous font jamais sortir de l’action grâce à un habile montage mêlé à des effets spéciaux réels.
Le Réveil de la Force était une suite efficace et bien menée mais on lui avait , à juste titre, reproché un certain manque d’audace scénaristique et visuelle. Cette audace Rogue One : A Star wars story en est bourré de par son ton guerrier et pragmatique, sa photographie sale, ses anti-héros sublimés, ses batailles inédites qui en mettent plein la vue et ses planètes aux visuels originaux. C’est assez paradoxal dans la mesure où Le Réveil de la Force se déroule dans une autre époque que la trilogie originale ( 30 ans plus tard) quand Rogue One: A Star Wars Story est complètement intégré dans la trame de celle-ci; sur le papier les idées novatrices auraient dû se situer chez le premier du nom mais c’est tout le contraire. En bref Rogue One: A Star Wars Story se démarque et ce dès les premières secondes avec l’absence de texte déroulant en guise d’introduction narrative.
Le film ne renie pas pour autant son héritage et c’est avec un plaisir d’enfant que l’on y retrouve les marqueurs de la saga comme les croiseurs impériaux, les virevoltants X-Wing ou les retours de visages connus comme ceux de Mon Mothma, Bail Organa ,du Grand Moff Tarkin et bien entendu de Dark Vador et de la Princesse Leia. Sans trahir l’esprit originel de la saga dans lequel l’oeuvre s’ancre, Rogue One: A Star Wars Story parvient également à sortir des sentiers battus.
Néanmoins le film n’est pas parfait et souffrent de quelques défauts qui l’empêchent vraiment de prendre une autre dimension cinématographique. Les membres de l’équipe “ Rogue One” paraissent tous très intéressants voire mystérieux seulement l’intrigue rythmée sacrifie quelque peu leur traitement. Si bien que l’attachement du spectateur envers tous les membres du groupe, à l’effectif pourtant limité, devient quelque peu compliqué. L’issue tragique aurait pu avoir une puissance émotionnelle décuplée si on avait “ mieux connu” ces personnages. Le rythme soutenu de la trame ne permet peut-être pas de s’attarder sur tous les protagonistes mais quelques scènes supplémentaires pour les approfondir auraient été très utiles.
La première partie du film paraît aussi un petit peu brouillonne dans sa construction bien que captivante. Elle n’est pas ratée mais le spectateur se retrouve baladé aux quatres coins de la galaxi een l’espace de quelques minutes avec une quantité considérable d’informations à assimiler sans qu’on lui laisse le temps de respirer un peu et saisir parfaitement les enjeux. Bien heureusement le film rectifie le tir passé la première demi-heure. Certaines critiques ont tiqué devant la modélisation 3D en “motion-capture” du Grand Moff Tarkin ( son interprète Peter Cushing dans Un Nouvel Espoir étant décédé ) , j’ai pour ma part trouvé la technique assez bluffante de réalisme malgré quelques petites approximations au niveau des expressions corporelles.
La fine équipe.
Au niveau du casting deux visages se détachent d’emblée : Felicity Jones ( Une merveilleuse histoire du temps, True Story ) et Diego Luna ( Y tu Mama tambien, Elysium). Ce sont sûrement les deux seuls acteurs bénéficiant d’une présence à l’écran assez conséquente pour développer de manière optimale leurs personnage: Jyn Erso et Cassian Andor. Après le succès Daisy Ridley , Disney a de nouveau confié le rôle principal à une jeune actrice qui remplit parfaitement le contrat dans ce rôle de vagabonde et forte tête qui n’a jamais froid aux yeux. Diego Luna parvient bien à transmettre l’ambiguïté de son personnage d’officier rebelle complètement dévoué à la cause mais aussi de se montrer d’une violence aussi froide que spontanée. Les autres têtes d’affiche font très bien le travail à commencer par Madds Mikkelsen ( Hannibal, 007:Casino Royale) qui ne force pas son talent mais dont le charisme naturel suffit, Ben Mendelsohn (Bloodline, Animal Kingdom) est parfait dans le rôle de cet officier supérieur peu à peu dépassé par les événements, le légendaire Forest Whitaker ( Le Dernier Roi d’Ecosse , Le Majordome) est totalement en roue libre dans son rôle décalé et nous livre une prestation aussi loufoque que fascinante. Riz Ahmed (Night Call)se montre en retrait malgré quelques regrets et le duo Donnie Yen (Ip man) / Jiang Wen (Let the bullets fly) ne dispose pas d’un temps suffisant pour montrer l’étendue de leur talent mais dans ce que l’on voit l’alchimie fonctionne à merveille. Mention spéciale à Alan Tudyk (Firefly)qui prête brillamment sa voix au droïde K-2SO.
Enfin, et malgré le ton plutôt pessimiste de l’oeuvre, l’humour cher à la saga est bien présent et passe encore par les droïdes même si là aussi on est dans un registre différent. K-2SO s’illustre par son cynisme et un humour peu conventionnel.
Le mot de la fin:
Après l’efficace mais trop peu audacieux Le Réveil de la Force Disney risquait gros avec ce spin-off attendu au tournant. Finalement Rogue One : A Star Wars Story est une réussite et un captivant film de guerre. L’univers de Star Wars est si fourni que divers histoires aux ambiances différentes peuvent y avoir leur place, le film profite donc de ce statut de spin-off et de one-shot pour ouvrir de nouvelles portes en espérant que d’autres films dérivés suivront son exemple. En cela la présence du “Star Wars Story” dans le titre est significative : on est bien dans l’univers de la saga mais pas vraiment dans celle-ci à proprement parler ; c’est précisément ce qui libère Rogue One: A Star Wars Story et lui confère une vraie singularité.
Oui oui ! C'est bien lui.
Ma Note: 16/20 Un très bon film de guerre dans l’univers de Star Wars. Osé et bien mené , dommage que le traitement des héros en pâtisse .
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