Blake et Mortimer :Le Testament de William S. (2016)
Blake et Mortimer :Le Testament de William S.
Scénario : Yves Sente Dessin : André Juillard
(2016) D'après les personnages d'Edgar P.Jacobs
La saga culte Blake et Mortimer s’engage avec cet album sur un terrain où on ne l’attendait pas vraiment et c’est plutôt un bon cru qui donne un nouveau souffle à une franchise qui commençait à stagner.
Pour cette nouvelle aventure Yves Sente a décidé d’évacuer la science-fiction, les mythes légendaires et autres phénomènes paranormaux présents dans les derniers tomes : dans Le Testament de William S. tout est beaucoup plus réaliste avec une intrigue calme et intimiste. Nous sommes amenés à suivre une enquête visant à faire la lumière sur les véritables origines des oeuvres du célèbre William Shakespeare au sujet desquelles différents groupes se querellent depuis des années entre soutiens du génie de Shakespeare et ceux qui l’accusent d’être un imposteur sans compter ceux pensant qu’il n’a jamais existé ou d’autres théories plus ou moins plausibles.
L’intrigue se concentre principalement sur le Professeur Mortimer qui mène l’enquête en compagnie d’une certaine Elisabeth McKenzie, fille d’une de ses anciennes amies. La dynamique entre les deux “détectives” est prenante entre le flegme britannique de l’universitaire d’un côté et la fougue de la jeune femme de l’autre. Les différentes étapes de l’investigation s’enchâinent bien et on ne se perd jamais dans des explications à tiroirs trop complexes comme la série a parfois tendance à étaler. Différentes références et informations au sujet de l’oeuvre de Shakespeare ponctuent le récit comme des hommages littéraires. On ne manquera pas également d’apprécier les petits éléments historiques qui donnent plus de corps au contexte de l’histoire ; la série l’a toujours parfaitement fait et cet album ne déroge pas à la règle malgré quelques anachronismes évitables ( La Tour de Londres n’était pas encore construite dans les années 1850 par exemple).
Le récit pêche toutefois quand il s’agit d’installer une certain tension et ce à cause d’antagonistes soit fades , soit inoffensifs et même parfois ,et c’est peut-être le pire, complètement inutiles. La présence des teddy-boys (groupes de jeune malfrats habillés comme des dandys qui sévissaient dans les jardins londoniens durant les années 50 ) était plutôt intéressante sur le papier mais dans l’album ils sont bien trop lisses et trop peu dangereux pour faire planer une quelconque menace sur nos héros. De son côté le retour d’Olrik , méchant emblématique de la saga , est peut-être la pire idée des auteurs. Il se contente de rester dans sa cellule de prison dans un rôle en retrait ( au moins cela nous aura évité une nouvelle évasion improbable qui tourne à nouveau en ridicule la police anglaise) à piloter à distance des incapables pour saboter l’enquête de Mortimer. Le problème c’est qu’il ne sert strictement à rien et pour cause : si on l’enlevait du récit celui-ci serait exactement le même. C’est typiquement le problème avec ce genre de personnage qui se retrouvent greffé à une intrigue parce qu’ils fallait les caser quelque part ; on se retrouve donc avec un personnage sans utilité et ajouté artificiellement qui va non seulement alourdir l’histoire mais se décrédibiliser totalement. Il aurait mieux fallu le laisser à l’écart pour mieux l’exploiter dans une autre aventure où il a sa place.
L’autre grande déception c’est le traitement de Francis Blake. Ce n’est pas la première fois dans la saga qu’il est en retrait par rapport au Professeur mais ici il est presque traité comme un personnage secondaire alors que c’est son nom qui figure en premier dans le titre. Difficilement compréhensible. Il n’est certes pas aussi inutile qu’Olrik mais l’officier anglais aurait mérité un meilleur traitement.
L’atmosphère général de l’album se veut plutôt paisible, beaucoup moins anxiogène que dans d’autres volumes où il est question de sauver le monde. Ici l’histoire suit sereinement son cours tandis que les enjeux sont peut-être les moins importants depuis le début de la série. Le suspense et la tension sont donc beaucoup moins présents mais en contrepartie on découvre quelques scènes du quotidien qui permettent d’en apprendre encore un peu plus sur les personnages et leurs habitudes. Cela se ressent aussi bien dans le dessin de Juilliard qui se révèle particulièrement doué pour représenter des paysages pittoresques et apaisants mais qui est bien moins à l’aise lors des rares moments d’action un brin caricaturaux et peu vivants ou pour les expressions des protagonistes assez sommaires.
Le mot de la fin
Le Testament de William S. nous propose une aventure moins mouvementée et aux enjeux bien moins primordiaux que les standards de la saga au profit d’une enquête plus paisible sur laquelle plane l’ombre de Shakespeare. Malgré de gros défauts dans la narration et des dessins inégaux le tout se révèle plutôt plaisant et rafraîchissant mais loin du niveau des meilleurs albums de la saga.
Ma Note : 12/20 Un bon album mais loin d’être inoubliable.
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